Départ en retraite : régression ou progrès pour tous

Pour le gouvernement Sarkozy, l’équité, c’est repousser l’âge du départ en retraite des salariés dont le statut est un acquis des luttes et un moteur du progrès social.
Mais pourquoi ne pas faire l’inverse ? Parce que, tout simplement, c’est l’ensemble des retraites qui est dans le collimateur libéral. Le président l’a dit. Il veut aller vite, très vite. Il s’agit dans un premier temps de faire sauter le garde-fou voire le repère que peuvent constituer les régimes spéciaux, quitte à s’engager dans une épreuve de force avec les syndicats en espérant les diviser ou leur faire mettre le genou à terre.
Dans un deuxième temps, dès 2008, il s’agit de mettre tout le monde au même régime. Travailler plus, plus longtemps, pour gagner moins. Qu’on en juge : passage à 41 annuités pour une retraite à taux plein alors même que les salariés entrent de plus en plus tard dans la vie active. Remise en cause de certains dispositifs tel celui des carrières longues. Remise en cause des droits familiaux et conjugaux dont les pensions de réversion qui permettent à des centaines de milliers de femmes, pour l’essentiel de s’en sortir après la mort de leur époux.
Et ce gouvernement, soit dit en passant, voudrait nous faire croire, quand il parle d’Europe, qu’il est pour l’alignement social par le haut quand, dès qu’il en a ici même l’occasion, il le fait par le bas.
Selon les Echos, une majorité de Français, 53%, trouveraient injustifiée la grève annoncée du 18 octobre. Elle serait justifiée pour 43%, ce qui témoignerait selon le journal économique d’une baisse de l’adhésion à une grève « par procuration » dont on a dit qu’elle avait marqué le mouvement de 1995 où un Juppé, « droit dans ses bottes », avait dû se déchausser.
Il est vrai que le gouvernement Sarkozy use et abuse de deux arguments massue. Un : ce sont tous les salariés qui paieraient les privilégiés des régimes spéciaux. Deux : il n’y aurait plus d’argent. Le premier argument est faux. Les régimes spéciaux, tout au contraire, contribuent au régime général. Le second argument n’est qu’à demi vrai. Il pourrait un jour ne plus y avoir d’argent dans les caisses si l’on ne réforme pas un système de cotisation qui épargne la richesse et qui persiste à ignorer que de nouvelles formes de salaires indirects en sont exonérées. Les actions gratuites ne cotiseront pas. Les stock-options ne cotisent pas, les revenus financiers non plus. Ainsi les masses d’argent dont se nourrissent les plus privilégiés et qui, en dernière instance, ne sont rien d’autre que le fruit du travail de tous, sont aussi intouchables que des vaches sacrées, disons des veaux d’or.
La grève du 18 octobre, comme le veulent la plupart des syndicats dont la CGT, ne sera pas une épreuve de force entre des professions accrochées à leurs privilèges et un gouvernement qui veut réformer. Elle devrait être un grand moment d’explication dans tout le pays sur l’enjeu de ce qui se passe autour des retraites et que le gouvernement veut masquer avec les régimes spéciaux. Un grand moment pour éclairer démocratiquement la politique dite sociale du gouvernement. Une politique et cela le sondage des Echos le dit aussi, dont les Français doutent de plus en plus.