Hénin-Beaumont. Le compte n'est toujours pas bon
Il avait fait de la baisse de la fiscalité un de ses principaux arguments de campagne. Mais les comptes de la ville étant toujours dans le rouge, Gérard Dalongeville, le maire d'Hénin, est aujourd'hui contraint par le préfet d'augmenter de 10 % les impôts locaux. Explications.
Un déficit de 12 millions d'euros et un rapport affligeant de la chambre régionale des comptes (CRC), en 2003, avaient déjà valu à Hénin une mise sous tutelle du préfet; aux Héninois un début d'infarctus à la lecture du montant de leur taxe d'habitation; et à leur maire, Gérard Dalongeville, dissident socialiste élu deux ans plus tôt, le surnom longue durée de « Monsieur 85 % ».
Un mandat plus tard, le scénario est le même ou presque. À la demande du préfet, la chambre régionale des comptes a encore mis le nez dans les finances de la municipalité. Une fois encore les experts ont arrêté leur loupe sur un déficit budgétaire d'une douzaine de millions d'euros. Également saisi par le préfet, le juge des référés du tribunal administratif de Lille, dans une ordonnance en date du 21 juillet, a même suspendu l'exécution de certaines délibérations prises en conseil municipal le 11 juin. Délibérations qui entraînaient en effet des dépenses d'investissement supérieures au plafond légal fixé par le code des collectivités territoriales pendant une enquête de la CRC.
À Hénin, la complexité des procédures vient s'ajouter au poids de la dette. Le 1er août dernier, suivant l'avis de la chambre régionale des comptes, le préfet a pris cette fois un arrêté qui règle d'office le budget primitif de la ville. Difficile pour les habitants de s'y retrouver dans un tel labyrinthe juridique. Ils retiendront seulement une nouvelle hausse des taux d'imposition de 10 %, jugée indispensable au rétablissement de l'équilibre budgétaire.
Dettes historiques ?
Gérard Dalongeville, à nouveau sous le feu des critiques, ne se départit pas de sa légendaire sérénité et relativise. « La CRC avait d'abord proposé une hausse de 25 %. On a voté contre. 10 %, à l'échelle du mandat, c'est deux points, c'est l'inflation. La municipalité actuelle n'y est pour rien. Il y a une part de dettes historiques conséquentes. Ça me fait mal au ventre qu'on m'impose le règlement de déficits qui datent de 1985. Mais on n'est pas là pour vomir sur les équipes précédentes, mais pour bosser », argumente le maire, déplorant traîner des budgets annexes normalement du ressort de la communauté d'agglomération.
Fausses excuses pour le Front national, qui n'a pas déserté le terrain après sa défaite aux dernières municipales. «On a atteint des dépenses de fonctionnement hallucinantes. Les charges de personnel représentent 60% du budget de fonctionnement. On est largement en sureffectif. Il aurait fallu les réduire de manière drastique, mais le maire a préféré le clientélisme au courage politique», estime Steeve Briois. Le leader frontiste, conseiller municipal de l'opposition, est plus que jamais convaincu du bien-fondé de son recours devant le tribunal administratif de Lille pour faire annuler les élections de mars 2008, accusant le maire d'avoir «détourné les moyens de la commune d'Hénin au profit de sa campagne électorale personnelle».
Gérard Dalongeville préfère ne pas rentrer dans «le jeu du FN qui se résume à dire tous des pourris les socialistes». Sa première adjointe, la députée européenne Marie-Noëlle Lienemann, juge, elle, que «le sujet numéro 1 n'est pas de trouver des boucs émissaires, mais de se mobiliser pour avoir des finances saines le plus vite possible.»
Seulement voilà, le FN n'est pas le seul à sauter sur l'occasion pour décrédibiliser le maire. Dans les colonnes de notre confrère La Voix du Nord, Daniel Duquenne, le chef de file de l'Alliance républicaine, ancien socialiste arrivé troisième aux municipales, le considère «seul responsable du déficit de fonctionnement». Accouchée aux forceps pour barrer la route au FN à la veille des dernières élections, la large alliance à gauche pourrait vaciller, comme le laisse présager un communiqué du communiste David Noël. « Les communistes ne portent aucune responsabilité dans ces hausses d'impôts que le maire, rassurant, s'était bien gardé de nous laisser entrevoir durant la campagne (...) », précise l'élu. Les parapluies sont ouverts.
Gaëlle Caron
Source : Nord Eclair
Vendredi 29 août 2008